En tant qu’établissement non médicalisé comment-vous êtes vous organisés pour faire face à la pandémie ?
Nous avons été confrontés à des protocoles que nous ne connaissions pas à la différence des EHPAD ou des foyers médicalisés : lavage des mains, port du masque, de charlotte, aération, relevé de présence à l’entrée des établissements. Il y a dû y avoir tout une familiarisation des professionnels sur ces protocoles pour répondre à cette situation de crise inédite.
Dès mars 2020, nous avons mis en place des cellules de crise hebdomadaires et ajusté les mesures selon l’évolution de l’épidémie.
Nous avons impliqué à la prise de décision tous les acteurs de nos structures : conseil de la vie sociale, délégués du personnel. Un administrateur de l’association, médecin à la retraite nous a prêté main forte pour nous donner des éléments de compréhension sur la Covid, la vaccination.
Dans les moments difficiles de cette crise sanitaire, nous avons fait en sorte que l’ensemble des personnes concernées, (les bénéficiaires des services), soient à nos côtés pour décider des mesures à prendre.
Il était important pour nous, que la prise de décision soit démocratique, notamment dans les moments critiques où la privation de liberté était en jeu, par exemple à l’occasion de confinement stricts.
Quel est l’état d’esprit de vos équipes après 20 mois de crise ? Leur état de fatigue ?
Depuis 5 ans, nous sommes dans un processus de changement, de transformation de l’offre médicosociale. De nouvelles structures ont rejoint l’association, nos ESAT s’orientent plus vers la recherche de nouvelles opportunités de marché. La crise a été pour nous un accélérateur de changement.
Au plus fort de l’épidémie, il y a eu de la fatigue parmi les professionnels liée davantage à des phénomènes d’absentéisme. Certaines équipes ont de ce fait été surchargées. Les remplacements de poste n’ont pas toujours été possible par l’offre intérimaire qui plus est dans un contexte de pénurie générale de main d’œuvre dans le secteur médicosocial.
A mon niveau, je n’observe pas chez les professionnels de réelle fatigue associée à la crise mais plus une lassitude sociétale.
Les souffrances psychologiques ont été un effet secondaire de la crise sanitaire. Il y a eu une sorte de libération de la parole sur les troubles psy, maladies mentales ?
Pensez-vous que cela va contribuer à changer le regard sur les personnes atteintes d’un handicap psychique ?
Le handicap psychique a été reconnu récemment par la Loi du 11 février 2005. Dans la société, il y a un phénomène de stigmatisation puissant des troubles mentaux qui entraînent souvent des phénomènes d’auto-stigmatisation chez les personnes atteintes de ces troubles et les professionnels de santé qui les accompagnent. A force d’être vue négativement par son environnement, la personne se conforte dans ce regard négatif et s’en persuade. « Je ne suis pas capable, je suis le fou, je dérange… ».
Aujourd’hui, je n’ai pas d’élément pour dire que la crise de la Covid a fait changer le regard sur le handicap psychique. Mais, je n’en suis pas certain. Car ces phénomènes sont insidieux. Les discriminations qui touchent ces personnes sont d’ordre plus général.
Pour faire bouger les lignes, je pense qu’il faut communiquer à travers des actions de médiation et de sensibilisation du quotidien au niveau locale, faire des micro-actions, comme par exemple : un partenariat avec le boulanger du quartier, des activités en commun avec le centre social, le centre culturel, les associations de commerçants, la mairie. Bref de travailler ensemble pour faire tomber l’image apriori que l’un peut avoir sur cet autre différent !